Les policiers davantage sensibilisés aux droits de l'homme grâce à la formation de Kazerne Dossin

La Police Fédérale et Kazerne Dossin présentent aujourd'hui les résultats d'une étude d'impact singulière. Ces résultats doivent montrer si les policiers sont davantage sensibles aux droits de l'homme et si leurs comportements et attitudes dans le cadre de leur travail changent après avoir suivi la formation « Holocauste, police et droits de l'homme ».

Kazerne Dossin

Marc De Mesmaeker, commissaire général de la Police Fédérale, et Christophe Busch, directeur de Kazerne Dossin, ont dressé le bilan du trajet de formation lancé en 2014 et déjà suivi par plus de 8 200 membres du personnel de la police. La présentation des résultats a lieu symboliquement la veille du 70e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

 

La formation

Chaque jour, des policiers sont confrontés à des dilemmes éthiques. En tant que forces de l'ordre, elles sont susceptibles, dans le cadre de leurs missions, de mettre à mal les principes fondamentaux qui régissent les droits de l'homme. Durant la Seconde Guerre mondiale, des policiers se sont retrouvés face à de graves dilemmes lorsque les nazis les ont obligés à commettre des rafles violentes à l'encontre des Juifs. Partant de ce constat, Kazerne Dossin - le musée de l'Holocauste et des droits de l'homme - et la Police Intégrée ont mis sur pied le trajet de formation « Holocauste, police et droits de l'homme (HPDH) » en 2014.

Cette formation d'un jour commence par une visite guidée du musée, axée sur le rôle de la police lors de la Seconde Guerre mondiale. Sur la base des exemples, les policiers qui participent à la formation se constituent un cadre théorique leur permettant de mieux cerner les différentes marges de manœuvre. Une fois ces connaissances acquises, les participants sont ensuite confrontés à des exemples pratiques tirés de leur travail quotidien. Des notions tels que le pouvoir, la responsabilité partagée et la dynamique de groupe jouent ici un rôle. L'ensemble du personnel de la Police Intégrée, qu'il soit opérationnel ou membre du cadre administratif et logistique, suit la formation sur une base volontaire. Cette dernière a même été intégrée à la formation de base des aspirants.

Kazerne Dossin



 

L'étude

Il y a trois ans, les professeurs de sociologie Bram Spruyt et Filip Van Droogenbroeck (VUB) ont, à la demande de Kazerne Dossin, commencé à étudier l'efficacité de la formation « Holocauste, police et droits de l'homme ». Les participants ont reçu un premier questionnaire à compléter juste avant le trajet de formation, un second juste après celui-ci et un troisième un mois après. Le but de cette enquête était de connaître l'impact subjectif et l'impact réel de la formation. Neuf participants sur dix ont affirmé que la formation leur avait apporté quelque chose. Presque 70 % d'entre eux estiment que la formation leur est utile dans leur travail quotidien. Enfin, 55 % se sentent évoluer vers une approche différente des choses. Les effets réels mesurés sont également considérables. Les répondants ont été confrontés à des cas de figure fictifs illustrant le comportement répréhensible d'un collègue. Il s'avère qu'après la formation, les répondants prennent davantage au sérieux le comportement du collègue en question, estiment que ce dernier mérite des sanctions plus sévères et sont plus enclins à rapporter le comportement répréhensible. L'impact le plus net a été observé dans le cas étudié qui était axé sur les préjugés ethniques et la négligence (un homme d'origine étrangère souhaite déposer plainte pour ne pas avoir été admis dans une discothèque).

Enfin, l'étude a également sondé les opinions socio-politiques des participants. Il en est ressorti qu'après la formation, la dominance sociale des répondants était moins élevée. Cela signifie qu'ils sont moins convaincus que certains groupes sociaux doivent être plus influents au sein de la société et que les inégalités sont une bonne chose. Tout cela va de pair avec la diminution de la distance ethnique et avec le fait que les participants affirment vouloir entamer des relations plus profondes avec des personnes issues d'autres groupes ethnico-culturels. Les participants semblent également moins disposés à se conformer à l'autorité sans faire appel à leur esprit critique. Il est du reste frappant de constater qu'entre la mesure effectuée juste après la formation et celle réalisée un mois plus tard, on remarque peu de différences, ce qui laisse penser que la formation a un impact durable. Enfin, force est également de constater que pour les policiers davantage confrontés à des victimes et des auteurs d'actes criminels, les effets sont moins significatifs et la demande en faveur d'un trajet de formation plus long est plus élevée.

Marc De Mesmaeker, commissaire général de la Police Fédérale : « La qualité du travail fourni et le respect d’autrui sont les principes et valeurs qui m’ont toujours animé.  Pour le premier, la qualité du travail, une certaine marge d’erreur humaine est certes acceptable, par contre, pour le second, à savoir la notion même de respect : absolument pas !

L’intégrité et le respect des droits de l’homme font non seulement partie intégrante du métier policier, mais en constituent aussi la base. L'article premier de la loi sur la fonction de police ne laisse planer aucun doute à ce sujet : Les services de police accomplissent leurs missions sous l'autorité et la responsabilité des autorités désignées à cette fin par ou en vertu de la loi. Dans l'exercice de leurs missions de police administrative ou judiciaire, les services de police veillent au respect et contribuent à la protection des libertés et des droits individuels, ainsi qu'au développement démocratique de la société. Pour accomplir leurs missions, ils n'utilisent des moyens de contrainte que dans les conditions prévues par la loi.

La formation peut être considérée comme une espèce de reality check afin de rendre ces éléments plus tangibles encore. Ces résultats me renforcent dans l'idée que le choix d'intégrer la formation « Holocauste, police et droits de l'homme » dans la formation de base des aspirants était le bon. Ces derniers disposent ainsi d'un cadre de référence clair dès leur premières expériences professionnelles. Un cadre qui s'inspire de l'Histoire et leur apprend à gérer les dilemmes susceptibles de se poser à eux.   

Si vous me demandez si cette formation a un impact, je vous répondrai : « oui, assurément ! » Si vous me demandez de résumer la formation en un mot, je vous répondrai « non », de manière quelque peu contradictoire.  L'étude démontre en effet que parmi les choses que la formation a réussi à apporter et continuera à apporter, c'est qu'il est toujours possible, pour chaque individu, chaque policier, homme ou femme, de dire « non ».

Marce De Mesmaeker & Christophe Busch